Banlieue nord, novembre, jeudi, zone d’activités. Au rez-de-chaussée du bâtiment, le garage ; à l’étage, les bureaux. Moquette grise, plafond bas, néons vifs, tâches d’humidité. Pas de cloisons et trop peu de meubles pour couvrir la surface. Je repère le photocopieur. — Vous avez rendez-vous ? — Non, je ne viens pas pour vendre ma voiture. Il regarde son collègue. Je remarque le drapeau du Maroc mal agrandi qu’il a choisi comme fond d’écran d’ordinateur. Ils ne comprennent pas. — Mais nous, on achète des voitures, Monsieur. — J’ai des photocopies à faire. Son collègue se lève. — Ça va pas être possible, Monsieur.
Parfois, on a soif. Parfois, on a faim. Parfois, il faut dormir. Parfois, il faut marcher. C’est irrépressible. Moi, là, il fallait que je photocopie. Il fallait que je photocopie sur ce photocopieur. Que j’entende le son. Que je voie la lumière verte. Que je reproduise. Que j’hume les feuilles chaudes. Après, je m’en irai.
Le boutonneux m’a attrapé par le col pour me pousser dans les escaliers. Je l’ai étendu, puis lui ai piétiné la figure. Le grand Marocain est parti en courant. J’ai sorti de mon sac à dos ma pochette verte, et de ma pochette verte, mon curriculum vitæ. J’ai demandé à la machine trois cents exemplaires recto verso (pour le plaisir) en noir et blanc.
31 août 2025
à partir de l’atelier d’écriture de Laura Vasquez du 13 juillet, avec les textes de Laura et d’Anna Akhmatova.